Le Califat / L’Etat islamique

Le Prophète () a dit : 

 « La prophétie restera parmi vous autant qu’Allah le souhaitera, puis Allah y mettra un terme quand Il voudra. Il y aura alors un Califat suivant la voie prophétique, qui vous gouvernera autant qu’Allah le souhaitera, puis Allah y mettra un terme quand Il voudra. Puis viendra un pouvoir injuste (et dynastique) qui vous gouvernera autant qu’Allah le souhaitera, puis Allah y mettra un terme quand Il voudra. Puis viendra un pouvoir tyrannique (dictature) qui vous gouvernera autant qu’Allah le souhaitera, puis Allah y mettra un terme quand Il voudra. Puis viendra alors un Califat suivant la voie prophétique. » Puis le Prophète () se tut.

Rapporté par Ahmed dans Al-Musnad

بسم الله الرحمن الرحيم

Définition

Un Etat peut être défini comme un instrument de gestion des affaires de la cité représenté par un corps d’individus organisés en une structure exerçant un pouvoir, couvrant un territoire de superficie variable, et sur lequel l’autorité est reconnue. Un Etat est en outre une entité dédiée à l’application d’un ensemble de conceptions, de normes et de convictions épousées par un groupe humain.

A partir de ces définitions générales, nous définirons l’Etat islamique comme étant l’entité qui dispose du pouvoir d’appliquer dans ses territoires et de diffuser à l’extérieur l’islam. Le Califat est ainsi la direction générale de tous les musulmans, dont la responsabilité est d’appliquer les lois islamiques et de transmettre le message de l’islam au monde. Il est également connu sous le nom d’Imamah.

C’est la forme que la législation a déterminé concernant l’État islamique. De nombreux récits authentiques font mention de cette entité en utilisant les deux termes susmentionnés comme des synonymes, aucun de ces deux mots ne renvoyant à des significations différentes dans les textes législatifs, à savoir le Coran et la Sounnah. Cependant, adhérer à l’un ou l’autre de ces mots n’est pas une obligation légale, il est plutôt nécessaire d’adhérer à leur signification.

Un Etat peut prétendre être islamique et sa constitution peut comprendre un article stipulant que l’islam est la source principale de laquelle découle la législation, mais de telles déclarations superficielles ne suffisent pas pour considérer réellement cet État comme étant islamique.

Critères

Quelques critères fondamentaux permettent de reconnaître un État islamique, parmi eux :

– La souveraineté revient à la législation islamique (charia). Cela signifie que ni les dirigeants ni l’Oumma n’ont le droit de déterminer d’eux-mêmes des lois pour organiser la société. La loi d’Allah Le Très-Haut est donc la référence unique (et non la référence principale) à partir de laquelle est déduite la constitution ainsi que toutes les lois qui régissent les rapports humains au sein de la société.

– l’imam est le représentant de l’Oumma élu pour gérer ses affaires, le pouvoir appartient à l’Oumma et c’est elle qui le confie à celui qu’elle désire pour mettre en application les lois. En islam donc, le plus haut poste de l’Etat ne peut être occupé que par un homme qui a fait l’objet d’une forme d’élection (désignation) et d’investiture (d’allégeance). Ce qui permet de déterminer la légitimité d’un calife et donc du Califat est l’acte d’allégeance, qui est un contrat de reconnaissance et de consentement mutuels. Il est ainsi impératif pour celui qui est désigné pour être chef d’Etat de recevoir cet acte d’allégeance consenti, et il est interdit de contraindre quelqu’un à accepter de devenir calife. Si l’allégeance a été contractée de manière fiable, alors elle sera considérée comme valide, celui qui aura reçu cette allégeance détiendra l’autorité, et lui obéir deviendra une obligation légale pour les administrés.

– L’Oumma doit choisir un seul calife pour la diriger. L’Etat islamique n’est pas un État tribal ni affiliée à une seule et unique école de pensée islamique en particulier. Le Califat n’est ainsi ni arabe, ni perse, ni pakistanais, ni afghan, ni saoudien, ni hanafi, ni chafi’i, ni jaafari. Il est l’Etat islamique sans aucun adjectif le limitant à un groupe spécifique d’individus. Il est au service des musulmans du monde entier, ainsi que de ces citoyens non musulmans. Les musulmans sont donc tenus d’avoir un seul et unique État et d’être gouvernés par un seul et unique calife.

– Seul le calife a le pouvoir d’adopter les avis juridiques qui deviendront des lois en vigueur dans l’Etat. Cette règle permet d’harmoniser, d’unifier et de garantir la stabilité de l’Etat dans son application de l’islam.

Une autre condition, qui découle de la définition de la « maison de l’islam » ou terre d’islam (« dar al-islam ») en opposition avec la « maison de l’incrédulité » ou terre d’infidélité (dar al-kufr), est que la sécurité intérieure doit être garantie par l’Etat islamique et non par des puissances non-islamiques comme pour beaucoup de pays de nos jours. Concernant les conditions permettant de considérer un territoire comme étant « Dar al-islam », nous pouvons effectivement citer l’application de l’islam, l’autorité détenue par les musulmans et la sécurité garantie par ces derniers.

La mère des obligations

L’application de l’islam est obligatoire, et l’islam ne peut être appliqué dans sa globalité que par le biais d’un Etat. En effet, un nombre incalculable de prescriptions islamiques ne peut être appliqué convenablement qu’en la présence de l’imamat. Tout ce qui est nécessaire à l’accomplissement d’une obligation étant obligatoire, l’établissement du Califat l’est indéniablement.

La nomination d’un calife est une obligation pour l’ensemble des musulmans du monde. Il s’agit d’un devoir communautaire décrété par Allah Le Très-Haut qui incombe à la communauté et duquel nul ne peut se dérober. Négliger cette prescription implique l’un des péchés les plus graves, méritant un châtiment sévère de la part du Législateur. L’obligation de l’imamat fait l’objet d’un consensus parmi les savants, et bon nombre de paroles d’érudits en font mention. Les preuves de cette obligation ne manquent pas (cf. Coran, Sounnah, et consensus des compagnons).

Le Coran rend obligatoire de juger, diriger, gérer la société selon les lois de l’islam dans bon nombre de versets. La manière dont cela (juger selon ce qu’Allah a révélé) est à appliquer concrètement est quant à elle détaillée à travers la Sounnah et le consensus des compagnons. C’est ainsi que les preuves concernant l’obligation de la nomination d’un unique imam à la tête des musulmans est déduites de la Sounnah et du consensus des compagnons.

Les piliers du pouvoir

Nous pouvons enfin énumérer les piliers du pouvoir en islam, tirés encore de la Sounnah et du consensus des compagnons, comme suit :
1) Un unique calife (chef d’Etat) pour tous les musulmans, en charge de faire appliquer les lois de l’islam.
2) L’assistant (ou adjoint) délégué (tafwid) du calife, chargé de l’assister dans l’adoption des lois et dans les affaires liées à la gouvernance.
3) L’assistant (ou adjoint) exécutif (tanfid) chargé de faire appliquer (exécuter) les ordres du calife.
4) Le chef des armées, ou commandant du jihad. Il est en charge des affaires étrangères, militaires, de la sécurité intérieure et de l’industrie.
5) Les gouverneurs des provinces, désignés par le calife pour gérer les affaires des musulmans dans leurs provinces respectives.
6) Les juges (l’appareil judiciaire).
7) Les services administratifs.
8) L’assemblée consultative (majlis ach-choura ou majlis al-oumma) pour débattre certaines questions, proposer des successeurs potentiels au chef d’Etat et pour discuter les lois contenues dans le champ du permis (moubah).

Ceci n’est qu’un résumé concis permettant d’avoir un aperçu du sujet du Califat. De nombreuses questions subsidiaires restent à développer et à approfondir.

Abou Zakaria