Les manifestations anti-hijab en Iran

بسم الله الرحمن الرحيم

Au cours des dernières semaines, des manifestations ont eu lieu en Iran et dans d’autres parties du monde en réponse à la mort de Mahsa Amini, une femme kurde de 22 ans, qui a été arrêtée par la police des mœurs iranienne pour ne pas avoir correctement couvert ses cheveux, puis a été battue à mort pendant sa détention. Il s’ensuivit des protestations, les plus importantes auxquelles le régime a été confronté depuis des décennies.

Recontextualisation des faits

Le régime actuel est au pouvoir depuis la révolution de 1979 après le renversement du Shah. Cette révolution communément appelée « révolution islamique » était en réalité une révolution antiaméricaine. Les groupes impliqués, souhaitaient faire de l’Iran une puissance régionale indépendante. Ces groupes étaient entre autres composés de communistes, de gauchistes, de syndicats et d’autres partis n’ayant aucune ambition islamique. Une fois au pouvoir, l’Ayatollah s’est retourné contre les groupes qui l’ont aidé à le prendre afin d’éliminer toute menace potentielle pour le nouveau régime. Actuellement, le chef suprême du régime est l’Ayatollah Ali Khamenei qui est au pouvoir depuis 30 ans.

L’Iran est un pays qui compte de nombreuses ethnies. Parmi elles, les persans d’une part qui représentent plus de 50% de la population, les kurdes et les azhéris d’autre part qui représentent les « minorités ». Ces deux minorités sont les cibles de maltraitance de la part du régime qui voit en eux une menace. Ils sont à l’origine des principales manifestations qui ont eu lieu depuis 40 ans. C’est encore le cas actuellement car Masha était kurde.

L’éminent sociologue iranien Mouhammad Fazeli, de l’université de Téhéran, a déclaré que les protestations ne sont pas simplement le résultat d’événements récents, mais qu’elles sont le produit de plus de 40 ans de mauvaise gouvernance en Iran. M. Fazeli a déclaré que de nombreux problèmes non résolus se sont accumulés au cours des quatre dernières décennies, sans que le gouvernement ne tente de les résoudre. Il a ainsi déclaré : « Lorsque le président Raisi prétend qu’il va enquêter sur la mort de Masha Amini, le peuple ne peut pas lui faire confiance car des cas similaires qui se sont produits dans le passé sont restés non résolus. » À cela s’ajoute la perte d’espoir en l’avenir après plusieurs décennies d’inflation, de croissance économique quasi nulle, de déclin du système administratif et de nombreux autres facteurs.

Le PIB de l’Iran a diminué de 70 %, passant de 599 milliards de dollars en 2012 à 191 milliards de dollars aujourd’hui ! Le niveau de vie en Iran a atteint son point le plus bas depuis plus d’un siècle. Les prix continuent de s’envoler, rendant les produits essentiels comme la nourriture et les médicaments, inabordables pour la plupart des iraniens. Tout cela a conduit à la colère envers le régime iranien et le règne raté des clercs.

Événements récents

De nombreuses manifestions ont secoué et secouent toujours le pays. On a pu observer durant ces manifestations des femmes par dizaines retirant leur hijab, le piétinant, l’incendiant, érigeant des « doigts d’honneur au côté de leur hijab », dansant et chantant au milieu des foules. Ces manifestations se sont rependues à travers le monde et l’on a pu constater une vague de soutien de la part des médias occidentaux, de personnalités publiques ainsi que sur les réseaux sociaux. Certaines femmes ont même coupé leur cheveux en « signe de soutien ». Nous pouvons ainsi constater que le hijab est ostensiblement pris pour cible au cours de ces protestations. Il est donc naturel de se demander comment devons-nous réagir à ces événements en tant que musulman.es.

Comment doit-on réagir ?

Tout d’abord, s’agissant de la mort de Masha Amini, le passage à tabac et la mort de cette dernière est condamnable en islam, et cela constitut un péché.

Concernant les protestations, il est utile de rappeler que les manifestations ayant des objectifs non islamiques sont formellement interdites, alors que dire de manifestations ayant pour but d’appeler à la désobéissance du Législateur. Par ailleurs, concernant les actes qui y sont menés tel que bruler le hijab (symbole des protestations iraniennes), si le tissu n’est en soit pas sacré, le fait pour ces femmes d’ôter leur habit de pudeur constitue un péché. En tant que musulman.es, même si nous pouvons nous indigner du passage à tabac et du meurtre de Masha, il est absolument interdit de soutenir les protestations iraniennes qui appellent à retirer le hijab et à commettre toute sorte de turpitudes. Il est en effet compréhensible que les gens soient en colère contre les actions oppressives et autoritaires du régime iranien, toutefois, cela ne saurait justifier les actes de rebellions contre les ordres d’Allah.

De plus, les actes des iraniennes ne portent pas seulement préjudices à elles-mêmes. Ces actes de désobéissance au Créateur servent aussi les objectifs de l’occident dans son combat mené contre l’islam. En effet, les pays occidentaux ne cessent de promouvoir une vision erronée du hijab. Ces derniers véhiculent l’idée que le hijab est un outil de domination imposé par une autorité masculine afin d’oppresser les femmes et de les soumettre. Ainsi, en retirant leur hijab en signe de protestation contre le régime, les femmes iraniennes cristallisent cette vision du hijab que l’occident souhaite établir et propager.

En outre, l’occident tirent profit de ces évènements en instrumentalisant une fois de plus le hijab afin d’accuser l’islam d’opprimer les femmes et renforcer les opinions anti-islam. Le but étant, de nouveau, de décrédibiliser la charia et la taxer de discriminer les femmes. De la même manière, les pays laïcs n’hésitent pas à se servir de la crise iranienne en présentant l’Iran comme un modèle de système islamique dans le but de prouver qu’un tel système est inégalitaire vis-à-vis des femmes, discriminatoire, oppressif et tyrannique. Une occasion de plus pour les pays dits « libéraux » de s’ériger en modèle et de revendiquer la démocratie comme un système juste et stable.

Pourtant, la réalité de ces pays occidentaux est tout autre : en France, une femme est tuée tous les trois jours par un partenaire actuel ou ancien ; à l’échelle de l’Union européenne c’est une femme sur trois qui est victime de violences et une sur deux d’harcèlements sexuels ; aux Etats-Unis, près de 3 femmes sont tuées chaque jour par des violences domestiques. Tout cela est le résultat de valeurs libérales telles que les libertés personnelles et sexuelles, qui encouragent les hommes à agir selon leurs caprices et leurs désirs individualistes. C’est aussi le résultat de l’absence de règles sociales claires pour réglementer les relations entre les hommes et les femmes et pour définir leurs droits et responsabilités au sein du cercle familial ainsi que dans la société afin qu’une relation digne et respectueuse s’établisse entre les sexes, basée sur une saine coopération.

Période de l’histoire iranienne passée sous silence par les médias occidentaux

Dans les années trente, sous l’autorité du nationaliste Reza Shah, des lois vestimentaires imposant le costume à l’occidentale pour l’homme et interdisant le port du voile pour les femmes en Iran sont établies. Suite aux persécutions et aux arrestations de nombreuses femmes iraniennes voilées à travers le pays, le peuple se soulève et se sont des milliers de femmes qui manifesteront contre le pouvoir laïc.

Conclusion

Ces manifestions ont donc très peu de chance d’aboutir puisqu’elles émanent de minorité et n’ont pas le soutien de l’autre part de la population. De plus, le gouvernement peut tendre à évoluer, et probablement délaisser le rôle de chef suprême religieux aux profits d’un chef militaire ou autre, il n’en demeure pas moins que l’appareil politique et la fracture societale qui en résultent ne peuvent être corrigés par ces manifestations. Le problème en Iran n’est pas le hijab ni certaines des lois prétendument islamiques appliquées, mais au contraire le délaissement et la non application de l’islam.

Le problème fondamental est en effet bel et bien le régime théocratique qui gouverne selon les dictats des clercs plutôt que selon le Coran et la Sounnah, car tout ce qui est gouverné par un autre système que celui qu’Allah nous a dicté, entraine inévitablement l’oppression des peuples :

« Quiconque ne gouverne pas par ce qu’Allah a révélé, ce sont eux les oppresseurs. »

(Cf. Sourate 5, verset 45).

Sources et inspirations :
Dr. Nazreen Nawaz – Directrice de la section des femmes du bureau médiatique central de Hizb ut-Tahrir.
Adnan Khan – Bureau médiatique central de Hizb ut-Tahrir.

Abou Zakaria