Islam et démocratie

بسم الله الرحمن الرحيم

Le système démocratique s’oppose au système du pouvoir en islam tant au niveau des fondements qu’à celui des idées de détails. S’il existe quelques ressemblances entre certaines structures des deux systèmes, cela ne justifie nullement de glisser vers l’amalgame. En effet, la démocratie relève de l’impiété (kufr), tandis que le système islamique est issu de la foi (imân). D’ailleurs, l’Etat islamique a assuré l’application du système de l’islam pendant plus de treize siècles sans jamais employer le terme de démocratie ni se référer à ses concepts.

Mais avec l’éclipse du système islamique, il n’y a plus, sur la scène internationale, qu’un système démocratique face à un ensemble de régimes dictatoriaux. Or, il est naturel de préférer la démocratie à la dictature policière. Une analyse ancrée sur le Coran et la Sounna conduit à la conclusion que tous ces systèmes ne sont pas islamiques, y compris la démocratie. En refusant cette fameuse démocratie, cela ne signifie pas que nous, musulmans, préférons la dictature policière inique ; c’est simplement une position qui reflète que les musulmans optent naturellement pour l’islam, véritable miséricorde pour l’humanité. S’il est vrai que l’islam et la démocratie se retrouvent sur certains détails tels que le choix du chef de l’Etat par le peuple, l’élection des représentants du peuple, le fait de demander compte aux gouvernants, etc., ces deux systèmes divergent sur des points fondamentaux. Le tableau suivant fait ressortir les divergences essentielles entre islam et démocratie.

« Est-ce donc la justice de la barbarie antéislamique qu’ils cherchent ? Et qui a une meilleure justice qu’Allah pour un peuple qui croit avec certitude ? »

(Sourate 5, verset 50)

LE SYSTÈME DEMOCRATIQUE

1) Les fondements du pouvoir émanent de l’esprit humain imparfait et sujet à l’erreur.

2) Le système gouvernemental peut prendre la forme d’une République ou d’une monarchie. Le passage de la monarchie à la République (ou inversement) est autorisé.

3) La démocratie repose sur deux idées maîtresses:
a) La souveraineté appartient au peuple;
b) Le peuple est la source des pouvoirs.

L’appareil d’Etat se compose de trois pouvoirs chargés de produire et d’appliquer les lois:
a) Le pouvoir exécutif (les ministres);
b) Le pouvoir législatif (le Parlement);
c) Le pouvoir judiciaire (la magistrature).

Ces trois pouvoirs s’appuient sur d’autres institutions comme l’armée, la sécurité générale, la sécurité intérieure, etc.

4) La souveraineté appartient au peuple. C’est donc lui qui légifère par le biais de ses représentants.

5) En démocratie, les tribunaux sont civils, c’est-à-dire non religieux.

6) Dans le système démocratique, la politique étrangère est axée sur le respect des frontières étatiques et des eaux territoriales. On y considère sacrée la liberté des peuples à choisir leurs systèmes et lois.

7) Le système démocratique préserve la séparation et la multiplication des petits Etats. Il défend l’idée d’« indépendance » de ces petits Etats.

8) Les institutions démocratiques respectent les nationalismes, les sectarismes et l’esprit de clan d’une façon générale; elles les encouragent même et les préservent.

9) Le chef de l’Etat est élu pour une période déterminée, son mandat pouvant aller de 4 à 7 ans.

10) En démocratie, on peut se rebeller contre les ordres du chef de l’Etat, manifester et déclarer son désaccord par rapport à sa politique.

11) Il est permis de constituer des partis sur d’autres bases que celle de l’islam (partis fondés sur la laïcité, le nationalisme, l’athéisme, etc.).

12) Sous la démocratie, la société est partagée entre sympathisants et opposants au régime.

13) La démocratie permet -en théorie- à n’importe quel individu de la société de prétendre au poste de chef de l’Etat, abstraction faite de ses compétences, de ses qualités personnelles et de sa religion.

14) La démocratie n’est pas la shûrâ ou consultation. Elle est un système de gouvernement ayant des règles globales et des règles particulières. Elle gère l’ensemble des affaires du pouvoir conformément à une certaine vision du monde. Cette démocratie n’émane pas de la charia et n’est donc pas une prescription légale comme l’est la shûrâ.

15) La démocratie ne se préoccupe pas de la source qui doit fournir les idées pour former la doctrine, la civilisation et les préceptes légaux.

16) La démocratie provient de la doctrine capitaliste qui sépare la religion de l’Etat et plus généralement de tout ce qui a trait à la vie, sa devise étant « Donne à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ».

17) En démocratie, la laïcité règne.

18) La vie au sein de la démocratie a pour référence la civilisation capitaliste qui est fondée sur l’intérêt pur et ne reconnaît pas de valeurs autres que matérielles.

19) Chez les adeptes de la démocratie, le bonheur est défini comme étant l’acquisition du plus grand nombre de plaisirs physiques.

20) En démocratie, c’est la majorité qui fait la loi, même si son opinion s’avère fausse. Il peut s’agir de:
a) La majorité du peuple pour un référendum;
b) La majorité des députés pour voter un projet de loi;
c) La majorité des ministres pour élaborer un projet de loi ou suivre une politique déterminée;
d) La majorité syndicale ou associative;
e) La majorité pour accorder ou refuser la confiance à un ministère;
f) La majorité obligatoire pour mettre en vigueur les décisions du Parlement ou du Conseil des ministres.

2l) La liberté, selon la conception occidentale du terme, n’a pas le sens de l’affranchissement d’un homme dans une situation d’esclavage: l’esclavage a disparu de nos jours. La liberté ne désigne pas non plus le fait de s’extraire d’une occupation coloniale car les Etats occidentaux ne sont assujettis à aucun colonialisme (ce sont eux les colonialistes). La liberté au sens démocratique n’est donc nullement opposée à l’esclavage et au
colonialisme. Les libertés dites fondamentales sont au nombre de quatre (4) :

1°/ La liberté de conscience ou de culte

Pour les adeptes de l’idéologie capitaliste, l’homme a le droit de croire à ce que bon lui semble, sans contrainte aucune; il peut, au gré de sa volonté, abandonner ses convictions ou sa religion pour en épouser d’autres. Ainsi, selon le point de vue de l’idéologie capitaliste, le musulman a parfaitement le droit de devenir chrétien, juif, bouddhiste ou communiste.

2°/ La liberté d’opinion ou d’expression

Sous la démocratie, l’individu a le droit d’adhérer à n’importe quelle opinion ou pensée. Il lui est également permis de militer pour n’importe quelle idée ou conviction. Il peut s’exprimer de la manière qu’il veut, sans que l’Etat ni les individus n’aient le droit de lui interdire quoi que ce soit. Bien plus, les lois de la démocratie ont pour rôle de préserver cette liberté d’expression. Elles cautionnent les opinions qui s’opposent à la religion et qui blasphèment contre elle (l’ouvrage de Salman Rushdie en est un exemple).

3°/ La liberté de propriété

C’est la liberté la plus caractéristique du système économique capitaliste. Elle a justifié l’idée de coloniser les peuples et de piller leurs richesses. La liberté de propriété autorise l’homme à acquérir des biens au moyen du vol dissimulé, de l’usure, du stockage des marchandises en vue d’influencer le marché, de la fraude, de l’escroquerie, des jeux de hasard, de la prostitution, du proxénétisme, de l’homosexualité, de l’exploitation commerciale des charmes féminins, de la production et de la vente d’alcool, etc.

4°/ La liberté personnelle

Dans le système démocratique, la liberté personnelle consiste à s’extraire de toute contrainte et à se dégager des valeurs spirituelles, morales et humaines. Elle donne à la jeunesse le droit d’adopter, au vu et au su de tous, n’importe quel comportement immoral et sans pudeur. Cette liberté personnelle -qui est la source du SIDA- autorise l’homosexualité, la prostitution, l’alcool, etc. et donne aux jeunes le droit de se rebeller contre leurs propres parents.

LE SYSTÈME DU POUVOIR EN ISLAM

1) Les fondements du pouvoir proviennent de la révélation du Créateur absolu et parfait.

2) Le système du pouvoir est le Khilafah. Le Khilafah interdit le pouvoir dynastique. Le Khilifah ne peut être transformé en monarchie ou en République.

3) En islam, la souveraineté revient à la charia (ou Loi islamique), non au peuple ou à la Oumma. La Oumma choisit des gouvernants, leur déléguant ainsi la faculté d’appliquer la charia et de propager l’islam.

L’appareil d’Etat repose sur huit (8) piliers:
a) Le Khalifah ou chef de l’Etat;
b) Les adjoints plénipotentiaires du Khalifah;
c) Les adjoints d’exécution;
d) Le responsable du djihad;
e) Les gouverneurs;
f) Les juges;
g) Les services administratifs;
h) Le Conseil de la Oumma.

4) La révélation est la source des lois. Le peuple, chargé de veiller à l’application de la charia, désigne des gouvernants pour la mettre en vigueur.

5) En islam, les tribunaux jugent exclusivement selon la charia.

6) Sous l’égide du système du pouvoir islamique, la politique étrangère est axée sur le djihad en vue de la diffusion de l’islam. Elle combat les frontières et les obstacles matériels, qui entravent le passage des individus de l’adoration de l’homme à l’adoration du Maître des hommes.

7) Le Khilafah ne reconnaît ni les frontières ni l’indépendance d’un pays islamique par rapport à un autre. La Oumma est une entité unique et indivisible. Il n’existe qu’un même Etat, une même armée, un même drapeau.

8) Le système du pouvoir islamique dissout le nationalisme et l’ethnocentrisme ; il leur substitue le lien idéologique de l’islam.

9) Le Khalifah est maintenu au pouvoir tant qu’il remplit les conditions requises pour sa fonction.

10) L’obéissance au Khalifah est obligatoire, sauf si son ordre va à l’encontre de la Loi islamique.

11) Il est interdit de constituer des partis politiques autres que ceux fondés sur l’islam dans sa doctrine et son système.

12) La société n’est pas divisée en deux camps diamétralement opposés (le pouvoir et l’opposition). C’est le peuple tout entier ainsi que le Conseil de la Oumma qui demandent compte au gouvernant; si ce dernier doit légalement être destitué, la Cour suprême (mahkamat al-madhâlim) se charge de prendre la décision qui s’impose. Le gouvernant n’est donc pas à la merci des humeurs et des passions de ceux qui représentent l’opposition comme c’est le cas dans le système démocratique.

13) L’islam stipule que pour occuper la fonction de Khalifah, on doit nécessairement être:

  • musulman;
  • loyal;
  • libre (c’est-à-dire ne subissant aucune contrainte);
  • de sexe masculin;
  • en pleine possession de ses facultés mentales.

En outre, il existe des conditions préférentielles, comme celle de posséder la compétence nécessaire à l’interprétation juridique (idjtihâd), etc.

14) La consultation ou shûrâ n’est pas un système de pouvoir avec des règles globales et des règles particulières. Elle ne figure même pas parmi les fondements du pouvoir. La shûrâ est simplement une technique qui consiste à demander un avis. Dans certaines situations, elle est obligatoire, dans d’autres non. De plus, la shûrâ est une prescription de la charia, non une production humaine comme la démocratie.

15) L’islam exige de celui qui s’en revendique de se soumettre au message du Prophète (SAAWS1) en tant que référence de la doctrine, de la civilisation et de l’ensemble des lois:

« Faites ce que le Prophète vous ordonne et gardez-vous de commettre ce qu’il vous défend de faire ».

(Sourate 59, verset 7)

« Ne vois-tu pas ceux qui prétendent avoir eu foi en ce qui t’a été révélé et ce qui l’a été avant toi ? Ils veulent se soumettre au jugement de la fausse divinité alors qu’on leur a ordonné de la nier. Satan veut les égarer bien loin ».

(Sourate 4, verset 60)

« Non, par Allah ! Ils n’auront la foi que lorsqu’ils se seront soumis à ton jugement ».

(Sourate 4, verset 65)

En outre, le hadith stipule que « toute action qui nous est étrangère est à rejeter ». L’islam interdit donc d’adopter ce que l’Occident conçoit comme doctrine, vision du monde, lois, etc. Or, la démocratie est un système occidental issu de la doctrine capitaliste qui fait une nette séparation entre la religion et la vie.

16) L’Etat islamique est basé sur la doctrine de l’islam dans laquelle la religion, l’Etat et la vie ne font qu’un: tous les problèmes de la vie et l’ensemble des affaires de l’Etat doivent être gérés selon les ordres et les interdits de Dieu absolu. Et César et ce qui est à César appartiennent à Dieu.

17) Dans le système du pouvoir en islam, la charia règne.

18) Le système de l’islam repose sur la civilisation islamique, qui est bâtie sur une base spirituelle, celle de la foi en Allah absolu. Pour la civilisation islamique, le licite et l’illicite sont la mesure de toute chose et l’élément d’appréciation de tous les actes.

19) Chez les musulmans et dans la civilisation islamique, le bonheur consiste à gagner l’agrément d’Allah en respectant ses ordres et ses interdits.

20) En islam, c’est la charia qui tranche les différends, même si ses partisans sont minoritaires. La majorité n’est pas consultée pour l’application des dispositions de la Loi.

L’opinion technique (c’est-à-dire celle des spécialistes et des experts) n’est pas soumise à l’avis de la majorité. Le seul cas où l’opinion de la majorité est prise en considération est celui dans lequel il s’agit de trancher une question qui se rapporte à un acte soumis à l’indifférence juridique (mubah); c’est ainsi que le Prophète (SAAWS) a, lors de la bataille d’Ohoud, suivi l’avis de la majorité des musulmans, qui pensait que l’armée islamique devait aller à la rencontre des impies (Qoreïchites) à l’extérieur de Médine.

21) Les libertés, au sens occidental, sont interdites par l’islam car elles s’opposent aux prescriptions de la Loi. La liberté dans la terminologie juridique islamique n’a qu’une seule signification : l’état de celui qui a été affranchi de l’esclavage, c’est-à-dire de l’asservissement exercé sur lui par d’autres hommes. L’esclavage n’existant plus, le terme « liberté » dans l’usage courant ne peut donc faire référence qu’à la conception occidentale. Ceci dit, le musulman est fier de sa soumission à Allah car être l’esclave ou le serviteur de son Créateur est la plus noble qualité que puisse avoir un croyant. Or, la véritable soumission consiste à obéir aux ordres de son maître. La position de l’islam par rapport aux libertés fondamentales postulées par la démocratie est la suivante :

1°/ La liberté de conscience ou de culte

Il est formellement interdit au musulman de changer de religion. Ainsi, le hadith stipule: « Tuez quiconque renie son islam ». Ce hadith concerne celui qui abandonne l’islam pour une autre religion. Il s’applique à l’apostat pris individuellement ou en groupe (comme ce fut le cas lors de la guerre menée par le Khalifah Abou
Bakr contre l’apostasie).

2°/ La liberté d’opinion ou d’expression

En islam, l’opinion n’est pas libre mais soumise à la Loi islamique. Il existe ainsi trois (3) sortes d’opinion:
a) L’opinion interdite, telle que la médisance, la calomnie, la diffamation dont sont victimes les femmes vertueuses, les attaques ou les propos injurieux contre l’islam, etc.
b) L’opinion obligatoire, telle que l’obligation d’ordonner les actes convenables et de mettre en garde contre les actes répréhensibles, demander compte aux gouvernants, etc.
c) L’opinion soumise à l’indifférence juridique : dire du bien ou se taire.

3°/ La liberté de propriété

En islam, l’usage des biens est strictement soumis à la Loi, qu’il s’agisse de les acquérir, de les échanger ou de les faire rapporter. Il est interdit au musulman de prendre possession d’un bien comme bon lui semble ; les moyens légaux d’acquisition d’un bien sont le travail (commerce, industrie, agriculture, prestations de services), l’héritage, les dons et les legs.

4°/ La Iiberté personnelle

L’islam interdit de se comporter suivant ses passions. L’individu n’est pas libre de se faire du tort ou de mettre fin à ses jours en se suicidant. L’islam interdit aussi les rapports sexuels hors mariage ainsi que l’homosexualité.

Il interdit également d’abandonner ses parents ou de ne pas subvenir à leurs besoins s’ils sont invalides. La Loi islamique interdit de « sortir » avec le copain ou la copine, de provoquer les filles dans la rue ou de leur adresser des paroles vulgaires et sans pudeur. Elle interdit même aux époux de s’embrasser en public. L’islam est donc aux antipodes de la liberté personnelle telle qu’elle est conçue en Occident.

L’amalgame que font certains entre islam et démocratie n’est donc qu’une vision superficielle due à un jugement hâtif. L’examen minutieux montre que ces deux systèmes sont diamétralement opposés, tant dans les principes que dans les détails.

S.w.B